Peut-on essayer la méditation ?
Parfois des personnes viennent en disant « j’aimerais bien essayer la méditation ».
Que répondre ? « Essayer c’est l’adopter » ? ou « essayer c’est prendre le risque de ne pas en faire » ? ou « essayer c’est s’exposer à toujours essayer » ?
Benjamin Schoendorff cite à ce propos John Forsyth :
Je me demande si essayer vous aide où si ça contribue à ce que vous vous sentiez coincé.
Par exemple, si vous posez un stylo par terre et ‘essayez’ de le ramasser, que se passe-t-il? Montrez moi à quoi cela ressemblerait d’essayer de ramasser le stylo. Si vous le ramassez, ça n’est pas essayer de le ramasser, c’est le faire.
Essayer a tendance à nous garder les mains suspendues juste au dessus de la vie, pas tout à fait au contact des choses.
Alors peut-être qu’essayer est une de ces choses auxquelles vous pouvez cesser de vous agripper.
La méditation est une ouverture naturelle à ce qui est, sûrement que si on essaye de s’ouvrir, on est dans un paradoxe qui fait tout sauf s’ouvrir.
Bien sûr on peut avoir peur de s’affronter dans ce moment de silence, ou peur de ne pas réussir face aux multiples pensées qui vont aborder notre conscience par exemple. Mais on a pu voir que ce vagabondage mental n’était pas un obstacle en soi, donc on peut rentrer dans l’expérience méditative à pieds joints (ou en lotus :-) ) sans chercher à essayer, sans crainte, sans objectif.
« si une centaine de pensées surgissent en vous en l’espace d’une minute, cela veut simplement dire que vous disposez d’une centaine de supports de méditation.
Vos pensées s’apparentent au fait de regarder un film. Sur l’écran il se passe un grand nombre de choses, mais nous n’êtes pas dans le film ou sur l’écran. Il y a un espace entre vous et ce que vous regardez. La même chose doit se produire quand vous observez vos pensées. Vous ne créez pas cet espace vous-même, puisqu’il a toujours été là : vous vous donnez simplement l’occasion de remarquer sa présence. Contentez vous de laisser se dérouler les pensées comme des adultes qui regardent leurs enfants construire des châteaux de sable ou jouer à la guerre avec des soldats en plastique. Les enfants s’impliquent intensément dans leur jeu, mais les adultes se contentent de les observer; en souriant de les voir si sérieux.
Le seul moment où la méditation cesse d’être méditation, c’est lorsque vous essayez de contrôler ou de changer ce que vous percevez. Toutefois si vous appliquez votre attention à cet effort de contrôle lui-même, vous ne quittez pas la méditation.
Aussi longtemps que vous maintenez votre attention, votre pratique est une méditation, quoi qu’il arrive par ailleurs.
Si vous vous souvenez que la conscience de tout ce qui se passe est méditation, méditer devient beaucoup plus facile que vous ne le pensiez. »
Yongey Mingyour Rimpoché
En abandonnant l’idée d’être un bon méditant ou celle de chercher à contrôler sa méditation, on peut s’ouvrir à cet espace méditatif en nous, sans craintes. Il n’y a plus à essayer mais à pratiquer.
« la méditation ne consiste pas à essayer d’atteindre l’extase, la félicité spirituelle ou la tranquillité, ni même à chercher à s’améliorer. Elle consiste simplement à créer un espace où il est possible de déployer et défaire nos jeux névrotiques, nos auto-illusions, nos peurs et nos espoirs cachés. Nous produisons cet espace par le simple recours à la discipline consistant à ne rien faire. » Chôgyam Trungpa
Pour faire une comparaison osée, mais vous avez compris que j’aime les comparaisons osées :-) ;
qui penserait essayer de faire l’amour ?
« Les personnes qui comprennent le principe du wou-wei (Agir sans avoir l’intention d’agir) savent qu’il est possible d’être ingénue sans être vierge, libertine sans être une prostituée, de même que doux et viril à la fois.
Nous sommes tous des êtres complexes aux multiples facettes. Certaines s’harmonisent bien entre elles alors que d’autres semblent s’opposer totalement. Selon que nous sommes au travail, à la maison ou dans la chambre à coucher, nous sommes quelqu’un de différent.
Le zen nous enseigne à faire l’amour avec tout notre être. Au lit, soyez à la fois innocence et expérience. Que votre cœur soit pur, mais également rempli de désir pour votre partenaire. Procurez-lui simultanément l’excitation du danger et le confort de la sécurité. Ne vous contentez pas d’essayer, agissez! » Philipp Toshio Sudo
N’essayez donc pas la méditation ! Méditez ! ;-)