Les codes secrets du Tarot de Marseille fascinent les chercheurs amateurs d’ésotérisme, passionnent les défenseurs de l’occultisme et alimentent le mental des liseurs/écrivains/auteurs d’histoires fantaisistes. Chacun y va de son fantasme, de Marie-Madeleine à l’abbé Suger… rien n’arrête l’intellect fécond de ceux qui revendiquent l’existence d’un code secret dans le Tarot de Marseille.
Tout et n’importe quoi a été dit/écrit à propos du Tarot de Marseille. Surtout n’importe quoi ! De ses mystérieuses origines situées dans l’Égypte antique ou en Chine, en passant par une création extra-terrestre puis par la croyance en ses pouvoirs divinatoires censés expliquer sa création… Bref, le dé-lire est infini tout comme l’est la capacité de l’esprit humain à créer des légendes.
Detlef Hoffmann écrit dans « Tarot, Jeu et Magie », le catalogue 1984 de la Bibliothèque Nationale : « S’il est vrai que le tarot est d’abord et avant tout un jeu, il est vrai aussi qu’il est bien plus. Son iconographie est un problème qui a stimulé et stimule encore l’imagination des écrivains et des charlatans, des occultistes et des artistes. »
Il ajoute que : « Le tarot ésotérique, bien loin d’être une contribution éclairante au problème de l’histoire des cartes à jouer, est devenu lui-même une histoire, une histoire de l’imaginaire ».
Il enfonce le clou : « Aujourd’hui, le tarot occultiste, principalement sous ses formes visuelles, doit être replacé dans le cadre d’une littérature et d’une imagerie de pure fiction. »
Voila des propos qui me semblent plus proches de la réalité que ceux des défenseurs de codes secrets dont la finalité se résume le plus souvent à un gros paquet de fric produit par des promesses non tenues de vendre ces codes aux profanes-pigeons qui, par voie de conséquence, finiraient par devenir des initiés.
Or, ces prétendus codes secrets dissimulés dans le Tarot de Marseille ne fonctionnent pas avec l’ensemble des jeux historiques, et je ne considère ici que les meilleures références du genre.
Ainsi, les révélations de Tchalaï que je respecte profondément comme chacun le sait, sont inopérantes dès lors que le jeu utilisé n’est pas celui de Paul Marteau – Éditions Grimaud. Il en est de même pour toutes les découvertes de codes secrets, ce qui fonctionne plus ou moins, avec le jeu de Nicolas Conver ne marche plus avec le jeu de Jean Noblet. Pire encore, le chercheur est parfois même « condamné » à acquérir un jeu de conception récente pour accéder à la compréhension de codes mystérieux. Un jeu spécialement conçu pour mettre ces fameux codes en évidence ! Il fallait y penser, ils l’ont fait. Il se cache parfois une grande intelligence économique derrière ces codes, ça n’échappera à personne. Hélas, si… les sujets sensibles à l’endoctrinement, perméables à l’esprit sectaire, tomberont dans les filets ésotériques et mercantiles des maîtres, des experts, des spécialistes et des gourous de tout poil.
Ces codes n’existent pas au sens de codes mathématiques. Les démonstrations faites par les uns et les autres reposent sur des détails graphiques qui ne sont pas communs à tous les jeux historiques. Ces détails sont parfois invisibles, sauf à utiliser une loupe au fort grossissement, et ils sont la plupart du temps interprétés (subjectivement) en faveur de la thèse de l’auteur du code. Il est facile de voir ce que l’on veut voir dans une image, c’est encore plus vrai lorsqu’il s’agit d’une image archétypale comme celle des tarots. Ainsi ces codes reposent sur des détails parfois millimétriques, des traits se transforment en œuf, en lettre, en équerre, en échelle. Même les baguettes se transforment en pénis ! Ce sont des réactions/visions qui résultent de l’EGO. Elles correspondent à l’échelle de valeurs de l’observateur. Parfois ces visions sont justes… Il en est ainsi pour le pénis du BATELEVR chez Noblet.
A moins que… ?
Je partage l’avis de Tchalaï qui écrivait : « Chaque commentateur a un peu raison : il a utilisé le Tarot comme une projection de son propre stade d’évolution, de ses propres préoccupations, expériences, convictions et/ou connaissances, de son EGO pour tout résumer ».
L’énigme est dans l’image, elle est simple, accessible à LAMOVREVX. Aucun livre n’est nécessaire, aucun professeur n’est indispensable. Il suffit de ré-apprendre à voir et regarder pour assimiler, intégrer, faire alliance avec le Tarot. Il n’y a rien à comprendre et aucun code à découvrir. Le Tarot de Marseille est un objet de jeu, de connaissances (de soi et du monde), de communication, de partage, d’introspection… destiné à tous. Il n’est réservé à aucune élite. Chacun, s’il en a envie, pourra entreprendre sa découverte pour son plus grand bonheur. C’est une source de réflexion et un moteur fabuleux pour l’expérimentation et la réflexion spirituelle. Sa dimension magique séduira les plus attentifs de ses observateurs.
Laurent EDOUARD