En communication non-violente nous apprenons à nous centrer sur nos émotions pour pouvoir exprimer des demandes pour combler nos besoins.
D’un point de vue bouddhiste on parle de trois Poisons, trois « émotions » perturbatrices qui nous empêchent d’accéder au bonheur durable :
1. L’avidité, la convoitise, le désir , en fait toutes les émotions qui nous font désirer un état ou un objet
2. La haine, la colère, jalousie, toutes les émotions qui nous font repousser un état ou un objet
3. L’ignorance, l’illusion, l’égarement, ce qui est à la base des deux premières, qui est en fait la vue fausse sur la réalité. J’y reviendrai.
La psychologie s’accorde pour dire que l’être humain dispose de quatre émotions de base : la joie, la colère, la peur et la tristesse. Chacuen ayant leur utilité :
1. La joie sert de moteur à l’envie de vivre et de progresser. Elle est source de motivation et de santé (La médecine découvre actuellement à quel point le moral joue un rôle important dans le pouvoir de guérison).
2. La colère sert à chasser l’intrus, à trouver et à mettre ses limites, bref à défendre son territoire et ses valeurs.
3. La peur signale un danger qui nécessite la mise en place de protections ou une nouveauté qui demande plus d’information et de préparation.
4. La tristesse permet de clore une période de vie et de “tourner la page”. Elle est adéquate chaque fois que nous avons un “deuil” à faire, que ce soit d’une situation ou d’une personne.
Mais le bouddhisme, comme la psychologie nous dit qu’il n’est pas possible de transformer nos émotions d’une manière rationnelle par l’intellect. Le bouddhisme dit que nous devons en comprendre leur nature. En effet si le premier pas de l’octuple sentier bouddhiste, est la Sagesse (l’inverse de l’ignorance, telle que nous l’avons vue ci-dessus) qui est l’abandon de l’attachement à l’ego, l’égocentrisme, la croyance en un ego solide, durable et indépendant, la deuxième étape est la pensée juste ou émotion juste (donc sans haine, avidité et ignorance).
Nous ne pourrons pas progresser sur la Voie (Do / Tao), l’octuple sentier, tant que nous n’aurons pas réussi à transformer notre nature émotionnelle. Et nos émotions étant plus fortes que la raison, nous devons nous assurer de leurs concours. Pour cela on examine son esprit avec la sagesse-connaissance qui nous permet de comprendre comment les deux premières émotions/poisons sont issues de la troisième : l’ignorance qui fait baser notre vie sur l’égocentrisme .
Et c’est la voie du cœur. Les émotions ne sont plus alors vues comme une perturbation mais comme l’indication du chemin à suivre pour trouver notre Nature de Bouddha.
« La nature fondamentale de l’esprit est souvent appelée dans le bouddhisme : la « nature de Bouddha », ou « véritable nature » ou encore « esprit ordinaire » ou « esprit naturel ». Mais pour le comprendre il faut en faire l’expérience directe, pour l’expliquer le Bouddha avait recours à des contes ou des métaphores, comme de savoir ce qui a le plus de valeur : la pépite enfouie dans la boue ou celle qui est nettoyée ?
Chaque fois que nous éprouvons de la peur, de la jalousie, du désir ou toute autre émotion qui contribue à notre sensation de vulnérabilité nous devrions nous donner une gentille tape dans le dos, car nous venons de faire l’expérience de la nature illimitée de l’esprit. Les pensées telles que « je suis laid », « je suis stupide » etc. ne sont rien d’autre qu’une sorte de boue neuronale qui obscurcit temporairement les qualités lumineuses de la nature de bouddha ou de l’esprit dans son état naturel. »
Yongey Mingyour Rimpoché
La méditation est une voie royale pour pour entrer en contact avec ses émotions avec authenticité, c’est à dire en se donnant le droit de les ressentir sans honte ni culpabilité, puis apprendre à écouter le message qu’elles transmettent.
Pour nous aider à aborder ces émotions le bouddhisme nous propose deux manières de les regarder suivant leur action sur l’esprit.
« Il y a trois catégories d’émotions : positives, neutres & négatives :
1. les positives comme l’amour, la compassion, l’amitié, la loyauté, renforcent l’esprit, accroissent la confiance et augmentent la capacité de secourir ceux qui ont besoin d’aide.
2. Les émotions négatives, comme la peur, la colère, la jalousie, le chagrin ou l’envie, ont tendance à nous affaiblir, à saper notre confiance en nous-même et à faire croître nos peurs.
3. Les émotions neutres sont des réactions mitigées qui ne sont pas plus qualifiables que celles que l’on peut ressentir devant un crayon ou une agrafeuse.
Si les émotions sont positives, portez votre attention à la fois sur le sentiment et son objet.
A l’inverse pour les émotions négatives, si vous prêtez attention à l’objet, vous risquez de renforcer votre impression que la personne, la situation ou la chose qui vous fait réagir est mauvaise en soi. Il faut donc prêter attention à l’émotion elle même et non à son objet. Contentez vous de la regarder. Vous pourrez voir qu’elle n’est pas aussi grande et forte que vous le pensiez.
Chaque affliction mentale est le point de départ de la sagesse. »
Yongey Mingyour Rimpoché
Quand enfin on arrive à voir les émotions telles qu’elles sont, sans (auto)jugement, nous pouvons prendre conscience que chacune d’elles nous parle d’un besoin satisfait ou insatisfait. La Sagesse, premier pas sur l’octuple sentier, nous amène à saisir l’importance ou la frivolité de ce besoin et en fonction de cela, il nous reste plus qu’à passer dans l’agir, à exprimer des demandes pour combler notre besoin ou prendre conscience qu’il ne peut être satisfait, en tant qu’adulte responsable, nous devons savoir que tous nos besoins ne peuvent être satisfaits.
Lung Ta Zen http://lungtazen.wordpress.com/