Shâqiq Balkhi, le Soufi, interroge un dévot :
- Comment te débrouilles tu dans la vie ?
Le dévot :
- Reconnaissant quand je trouve, patient si rien ne s'offre.
Le Soufi :
Mais c'est la voie des chiens !
Le dévot, blessé, demande alors :
- Et ta méthode, qu'est-ce donc ?
Le Soufi :
- La voici : s'il m'arrive quelque bien, j'en fais don à autrui. Quand rien ne se présente, j'en rends grâce à Dieu
Extrait du Nafahat-ul-Uns de Jami
Dj?m? fut l'un des derniers grands poètes soufi écrivant dans la tradition des classiques. Son oeuvre Nafahat ul-?ns est une biographie de 625 mystiques.
Par cette petite anecdote, Jami pointe, à mon humble avis, une erreur très courante dans la démarche spirituelle. Une erreur que de nos jours on rencontre fréquemment encore. Sur la voie spirituelle, l'acceptation, la patience, sont des valeurs communément reconnues. Cependant, telles que pratiquées par le dévot, ce n'est que paresse, et au final un renforcement de l'égo. En Inde, on dirait probablement qu'il s'agit d'une démarche tamasique.
Le Soufi, éclairé, va plus loin. Dans son acceptation, il n'accepte pas son égo.